…d’écrire #6 : Prendre son mal (de pied) en patience
Mardi dernier, je vous annonçais mon accident… duquel, heureusement, Tibonhomme est sorti indemne.
Ce n’est pas vraiment mon cas.
Aux urgences lundi dernier, le médecin n’avait diagnostiqué qu’une grosse entorse… 3 semaines d’immobilisation avec attelle, et le tour était joué. Finalement, je m’en sortais pas trop mal dans cette histoire, même si moralement, c’était dur à vivre… Quand on est du genre à se rejouer toute sa vie dans sa tête, ça fait des dégâts…
Mardi dernier, je passais donc ma première journée d’éclopée… assise quasi toute la journée dans mon fauteuil à bascule, le pied énorme. J’avais mal, mais sans plus… les simples dolipranes suffisaient à me soulager, partiellement du moins.
Mercredi… 5h du matin… Pour une fois, ce n’était pas Tibonhomme qui nous réveillait… mais bel et bien mon pied… une douleur atroce… digne d’un début de contractions d’accouchement. Je prends mon doliprane pour essayer de soulager la douleur et je prends mon mal en patience une première fois… le temps que la vie de famille suive son cours… Titechérie à l’école, emmenée par une voisine, Tibonhomme chez une autre maman (car pas de crèche le mercredi)…
Je préviens Ticoeur qu’il va falloir retourner aux urgences. On se prépare. J’arrive à me lever pour aller mettre ma chaussure dans l’entrée, enfiler mon gilet et mon manteau. Prête à partir. Je prends mes béquilles pour me lever… et là, je commence à voir des petites étoiles qui ne sont pas bon signe. Habituée de celles-ci, je sais qu’il faut que je m’assoie rapidement si je ne veux pas me vautrer par terre comme une misérable crêpe. Alors je m’assoie. Et en fait, non, je vais plutôt m’allonger… on est bien allongé, non ? Je ne me suis pas vautrée, mais tout de même étalée comme une misérable crêpe sur le carrelage dur et froid de mon entrée.
Du coup, Ticoeur appelle le SAMU… qui ne répond pas… Il appelle donc les Pompiers qui lui transfère le SAMU… logique… Moins de 30 minutes après, des ambulanciers privés arrivent et m’embarquent aux urgences… Je plaisante un peu avec les ambulanciers quand ils me demandent de chiffrer ma douleur… Je ne sais pas vous, mais je ne sais pas du tout évaluer ma douleur sur une échelle de 1 à 10… Ils me disent 0 c’est que vous n’avez pas mal… 10 c’est comme des contractions d’accouchement… Je leur réponds que non, les contractions, c’est plutôt 13 en fait… ils rigolent… Moi un peu moins… je souffre ! Du coup, je dis que c’est à 8 ou 9, quelque chose comme ça… Une façon pour moi de minimiser ma souffrance. Sur le moment, on a plus l’envie de répondre que c’est 15 voire 20 !! Ils me soulagent d’un chèque de plus de 100 euros à l’arrivée à l’hôpital…
Aux urgences, je revois les mêmes personnes que lors de ma première venue deux jours plus tôt… le même infirmier d’accueil, le même brancardier… « Tiens, encore vous… on s’est déjà vu non ? »… oui… malheureusement…
Je suis emmenée dans une première salle… puis transférer 5 minutes après dans une autre salle avant d’être emmenée à la radiologie, pour passer un scanner cette fois et être déposée dans une salle d’attente à l’intérieur même des urgences… un espace bizarre où personne ne s’occupe vraiment de toi… et c’est parti pour une longue agonie de plus de 6 heures sur mon lit, à pleurer, trembler, claquer des dents tellement la douleur est intenable ! Je suis tombée sur une infirmière qui malheureusement n’avait pas grand chose à faire de moi… et qui m’a laissé souffrir longuement sans un seul anti-douleur… Je sais bien que les urgences sont surchargées, que le personnel soignant ne peut pas tout faire, et que les infirmiers sont un peu dépendants des médecins pour la prescription des médicaments… mais vraiment, pour ce qui est de la gestion de la douleur des patients, je ne comprends pas comment on peut laisser quelqu’un souffrir le martyr comme ça sans rien lui donner pour le soulager, ne serait-ce qu’un minimum. J’ai eu le droit encore et toujours à du doliprane… seul remède contre tous les maux de la Terre aux Urgences…
3 médecins viennent enfin me voir mais sans grande certitude sur mon cas… Même avec le scanner en poche, ils ne me disent rien.
Au bout d’un moment, un brancardier vient me chercher et me dit que je vais au service de chirurgie orthopédique au 2ème étage… J’ai une fracture… Ah ? Bah c’est gentil de me l’apprendre…
Jusqu’à 20h, mon pied me lance… J’ai envie de le couper et de le balancer du 2ème étage… On me donne enfin un antalgique plus fort… mais il faut qu’il fasse effet… et là, j’ai la mauvaise idée de vouloir me lever pour aller faire pipi… Et là, c’est le drame ! Impossible de faire plus d’un pas. Ma voisine de chambre vient m’aider à m’asseoir, appelle l’infirmière et l’aide-soignant de garde… et je me fais disputer… Je n’ai plus le droit de me lever jusqu’à nouvel ordre… Si vous voulez faire pipi, c’est dans le bassin, il faut nous appeler… ok… Et le douleur s’est réveillée… et je souffre…. je souffre… en ayant l’impression que je vais vraiment enfanter par le pied… Zeus a bien donné naissance à Dionysos par la cuisse, pourquoi je n’arriverai pas à donner naissance à un demi-dieu par le pied…
Après une courte nuit… oui parce qu’à l’hôpital, ne comptez pas faire une grasse matinée… les médicaments antalgiques qu’on me donne font un peu plus effet que le vulgaire doliprane. Les douleurs sont moins intenses, mais j’ai du mal à comprendre ce que j’ai. Pendant mon séjour, j’ai dû voir 4 médecins différents pendant les visites du matin… le premier me dit que j’ai bien une fracture, et qu’on va peut-être devoir m’opérer pour me poser des broches… le second et le troisième ne connaissent pas le dossier, donc on leur réexplique une n-ième fois que je me suis fait renverser par une voiture… et patati et patata… le 4ème, que j’avais déjà vu aux urgences, se demande ce que je fais là alors que je n’ai rien de cassé… Je regarde l’infirmière, elle voit ma détresse… je ne comprends plus rien. Elle vient me rassurer et me dire que oui, j’ai bien une fracture du pied droit. Les deux derniers jours, c’est le même médecin que le premier jour… au moins il connaît mon cas… mais il est dépité par mon pied qui ne veut pas dégonfler ! Le 6ème jour d’hospitalisation, il décide tout de même de me plâtrer et me faire sortir de cet enfer !
6 jours à noter ma douleur entre 0 et 10… 6 jours à répéter que je suis végétarienne (voire végétalienne) et que je ne mange pas de poisson, de viande, ni même d’oeufs… J’ai fait une exception sur les produits laitiers. 6 jours à rester allongée les jambes en l’air ou assise quelques heures par jour, histoire de changer de position. 6 jours à lire, à regarder un peu la télé (ce que je ne fais jamais chez moi), à faire du crochet (j’ai commencé une écharpe pour Ticoeur)..
En 6 jours, j’ai eu aussi 4 voisines de chambre différentes, dont 3 vieilles femmes. La première avait 8 enfants, venaient de se faire opérer du canal carpien, mais m’a tout de même beaucoup aidée lors de cette première nuit bien difficile à l’hôpital. La deuxième était très coquette, elle passait beaucoup de temps à prendre soin d’elle malgré son opération, elle était aussi très exigeante envers les aides-soignants, mais très gentille. J’ai appris quelques jours après qu’elle avait la sclérose en plaques… La troisième, je ne l’ai eu que quelques heures avec moi… une dizaine d’heures interminables avant qu’on la change de chambre. Elle ne se souvenait de rien, pas même d’avoir fait pipi 5 minutes avant… Et j’ai dû lui répéter au moins 50 fois qu’elle devait rester couchée, qu’elle ne devait pas toucher à sa perfusion, qu’elle avait le col du fémur cassé et qu’elle ne pouvait donc pas marcher… Ca m’a occupé une partie de ma journée, en souriant parfois… mais au fond, j’étais triste pour elle… Je n’aimerai pas être comme ça quand je serai vieille… L’infirmière de garde a eu pitié de moi et l’a changé de chambre pour qu’elle soit toute seule car ingérable avec un autre patient…. Ma dernière voisine, pour la dernière nuit, était pour une fois plus jeune que moi de 3 ou 4 ans. Elle venait se faire opérer de l’épaule. Elle était très nerveuse à l’idée de se faire opérer. Elle a vu mon soulagement quand le médecin m’a dit que je pourrais sortir ! Mais elle était bien triste de me voir partir car elle allait bientôt partir au bloc et aurait bien aimé avoir une voisine connue en revenant…
Ces 6 jours ont été très éprouvant… j’étais fatiguée, déprimée, triste d’être loin de ma famille et de ne voir mes enfants que 10 minutes par jour… à repenser à cet accident…
Le samedi soir, j’ai exprimé mon souhait de me faire aider psychologiquement. L’aide-soignante m’a dit qu’il y avait une infirmière victimologue dans l’hôpital… malheureusement, il s’est avéré que celle-ci était partie depuis presque 2 mois… Et non remplacée, bien évidemment… La veille de mon départ, lundi donc, j’ai eu le droit à la visite d’un psychiatre. Deux stress importants en peu de temps, ça fait des dégâts sur le moral. Il me prescrit un petit médicament léger qu’on donne même aux enfants avant une opération, pour les détendre… J’accepte de le prendre, moi qui ne suis vraiment pas fan des médicaments de ce genre ! Juste le soir, pour m’aider à m’endormir… Il ne rend normalement pas dépendant.. Je ne compte pas le prendre longtemps… tant que la douleur physique est là seulement…
Depuis mardi soir, je suis donc chez moi… Et ça fait du bien de revoir mes enfants et mon mari… même si je ne peux absolument rien faire… entre assise dans mon fauteuil à bascule, mon lit et ma chaise de bureau inconfortable à souhait, je suis toute de travers sur ma chaise pour pouvoir mettre mon pied en hauteur. J’ai aussi le droit à une piqûre par jour faite par un infirmier à domicile… car ni Ticœur, ni moi-même, n’avons le courage de me faire endurer ça… et ça fait marcher l’économie locale !
45 jours de plâtre… 1 mois et demi… et 2 mois d’arrêt de travail… 1 prise de sang à faire toutes les semaines, et donc 1 visite chez le médecin toutes les semaines… 1 mois et demi à m’habiller qu’en bas de jogging, car c’est le seul pantalon que je peux enfiler… 1 mois et demi avec des béquilles qui me font des ampoules aux mains… 1 mois et demi à prendre ma douche assise sur un marche-pied, mon pied plâtré emballé dans du plastique… 1 mois et demi à n’avoir finalement qu’un pied valide (si on compte le pied plâtré et les 2 mains prises par les béquilles)… 1 mois et demi aussi à accueillir plein de nouveaux abonnés sur mon Instagram à chaque fois que je poste une photo de mon pied (des fétichistes…)… 1 mois et demi à ne quasi rien faire de mes journées (qui a dit que ça ne changerait pas de d’habitude ?? Qui ?… Attention, je vous surveille !)…
1 mois et demi à prendre mon mal (de pied) en patience…
Vous me tenez compagnie ?
Les Mamies Stars
3 décembre 2015 at 22 h 44 minBien sûr, on vient vous tenir compagnie !
Rien faire toute la journée ? Mais si, bloguer !
On vous souhaite beaucoup de patience et une bonne soirée, malgré tout.
Niya
4 décembre 2015 at 9 h 11 minMerci les Mamies Stars. Je savais que je pouvais compter sur vous pour me tenir compagnie 🙂
Merci encore pour tous vos messages encourageants !
Holy
4 décembre 2015 at 18 h 19 minOhh courage!!! Une occasion de poster poster et poster 🙂 on te tiendra compagnie en te lisant et en commentant :). Re courage
Niya
10 décembre 2015 at 14 h 24 minMerci beaucoup Holy 🙂
Alexandra
5 décembre 2015 at 14 h 39 minBien sûr que je te suis. Je ne pensais pas que tu avais autant mal.
J’aime beaucoup ton texte.
Bisous soigne toi bien.
Niya
7 décembre 2015 at 12 h 59 minMerci Alexandra. 🙂
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